Quand Péha et moi sommes partis en Nouvelle-Écosse le mois dernier, on savait qu'une telle chose pouvait se produire, mais là n'était pas le but de notre voyage. On voulait pouvoir voir d'autres endroits, explorer, et se retrouver enfin seul au monde. Et bien, nous ne serons jamais plus seuls tous les deux. C'est génial de penser qu'une petite crevette maritime germe en moi! C'est génial, mais tout à fait irréel! C'est bien qu'une grossesse dure 9 mois, ça va nous permettre de nous habituer à la chose, de nous préparer mentalement et physiquement, de nous faire à l'idée.
Y'a plein de couples autour de nous qui essaient de faire des bébés en vain, je me sens un peu coupable envers eux. C'est triste de voir que certains désirent ardemment une chose sans pouvoir l'atteindre. Je culpabilise qu'il ne nous ait fallu aucun effort, aucun moment d'attente et de déception, aucune période de questionnement sur notre mécanique, pas de médecins ou de spécialistes dans le portrait, que nous, une tente, l'air de la Nouvelle-Écosse (et les nombreux jours de pluie) et une tonne de tendresse. Mon Péha est un vrai Starbuck et moi la génisse en transformation! Y'a tellement de monde qui feraient de bons parents que je me demande si cette crevette a bien fait de nous choisir... (Voilà le début de mes angoisses de mère! et je suis certainement pas au bout de mes peines.)
Et puis c'est poche comme début! Je revenais chez moi à vélo avec le chien d'une amie (je sais, chien en laisse et vélo, c'est pas très intelligent!), et à deux coins de rues de chez moi, une madame s'est mise à appeler mon chien (ça non plus c'est pas brillant), le chien est parti à la course et moi j'ai atterri sur la chaussée. La dernière fois que je suis tombée à vélo remonte à y'a 20 ans. Dans mon souvenir, je m'étais sentie perdre l'équilibre, tomber et puis j'avais senti la douleur. Pas cette fois! La première chose que j'ai compris c'est que l'asphalte, c'est dur, que les gens devant le cinéma sont venus me voir (bien sûr je ne peux pas tomber là ou il a personne, il faut absolument que je me donne en spectacle). L'orgueil, le coude et la main endolorie je suis repartie chez moi à côté de mon vélo, j'ai attendu d'être hors de porté de vue des gens pour éclater en sanglot. J'ai vraiment eu mal! Je ne pouvais plus bouger le coude, ni même l'épaule. Lorsque je suis arrivée chez moi, mon amoureux se demandait bien ce qui avait pu m'arriver. Il m'a consolée, calmée, flatté l'épaule, a soufflé sur ma grosse plaie mauve et fait à dîner. C'est après tout ça que nous avons fait le test!
Péha voulait absolument être là pour voir le petit plus apparaître. Je me suis quand même gardé une petite gêne et j'ai fait ma besogne seule, les résultats ont été instantanés! Je le savais déjà au fond de moi (même si je n'avais eu aucune nausée, même si je n'étais pas encore en retard, même si je ne sentais rien de changé en moi... sinon pourquoi aurais-je voulu faire le test?) mais de voir ce petit signe se dessiner devant moi rendait la chose tellement plus concrète. Et pourtant ce n'est qu'un pipi sur le bout d'un bâton de pop-scicle.
Péha n'a pas voulu y croire tout de suite. Il est reparti au boulot pour l'après-midi en me disant qu'on referait le test à son retour. Moi j'ai flotté sur un nuage tout l'après-midi. Je suis allée voir un "ramancheur" et puis j'ai acheté une petite camisole pour nouveau-né avec une grosse baleine dessus. Je sais pas si c'est le "ramancheur" qui m'a guéri ou bien la crevette, mais mis à par la grosse cicatrice que j'ai sur le coude je n'ai ressenti ni douleur, ni courbature dans les jours qui ont suivi.
Bien sûr le deuxième test était lui aussi positif et Péha à finalement glisser dans mon camp de bonheur assourdissant.
C'est fou, nous allons être parent! Wow!
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